Le colonel Blaise Gomou, ex membre des services spéciaux et de la lutte contre la drogue et le grand banditisme, présent au stade du 28 septembre lors des violences de 2009, a comparu pour la seconde fois à la barre du tribunal criminel pour répondre aux questions des procureurs et avocats.
L’officier supérieur affirme n’avoir vu « ni cadavre, ni femme violée, ni personne blessée », ce qui a semblé bizarre aux yeux de l’accusation, surtout dans une ambiance de chaos et de violence comme le jour des massacres et exactions qui ont fait au moins 157 morts et une centaine de femmes violées.
Gomou a d’ailleurs rejeté tous les chefs d’accusation prononcés contre lui, en affirmant qu’il a quitté la scène des violences dès après l’arrivée des bérets rouges qui, selon lui sont venus à bord de 4 à 5 pickups, dirigés par Aboubacar Diakité dit « Toumba », l’ancien aide de camp du capitaine Moussa Dadis Camara.
Cette version est différente de celle du commandant Toumba qui a, pour sa part, indiqué que c’est plutôt le capitaine Marcel Guilavogui qui est venu avec hommes au stade. « Ils se sont mis à tirer. Je leur ai demandé « qui vous donné l’ordre de tirer » ? Marcel ne m’a même pas regardé : il a continué en tirant », avait témoigné à la barre l’ex aide de camp de Dadis, il y a plusieurs semaines.
L’officier supérieur des services spéciaux a soutenu le lundi 30 janvier 2023 que « c’est à l’arrivée des bérets rouges que les choses ont dégénéré là-bas, ils étaient bien armés plus que mes hommes et c’est pourquoi d’ailleurs j’ai donné l’ordre a ce qu’on se retire. J’ai vu Toumba tirer et toute mon équipe l’a vu », affirme-t-il.
Chose curieuse, Gomou n’est pas parvenu à déterminer le nombre, même approximatif, des bérets rouges qui tiraient encore moins leurs identités, en dépit des nombreuses questions autour de ce point.
A plusieurs reprises, les procureurs et les avocats l’ont mis face à ses déclarations « contradictoires », notamment quand il lui a été demandé de citer les noms des agents qui sont venus avec lui dans le même véhicule, au stade du 28 septembre, ou de permettre l’identification des éléments qui, selon lui, accompagnaient Toumba.
Gomou a prétendu ne pas connaître leurs noms. Il n’a pas également, contrairement à Tiegboro Camara (secrétaire d’état chargé des services spéciaux à l’époque), reconnu formellement Marcel Guilavogui.
« J’ai décroché pour protéger la vie de mes hommes », a soutenu Gomou, affirmant que ses subordonnés qui sont venus avec lui dans un pick-up étaient « inexpérimentés » et ne pouvaient pas s’opposer aux militaires.
Assailli par les questions, l’ex membre des services spéciaux a justifié sa présence au stade par la nécessité de lutter contre d’éventuels bandits qui voudraient profiter de la situation liée à la manifestation. Une version que l’un des avocats de la partie civile a jugée « peu convaincante »…
Gomou affirme n’être jamais entré au stade et a tenté également d’expliquer son replis avec ses hommes par le fait que les bérets rouges étaient armés, tiraient en l’air et qu’il y avait des « antécédents » entre lui et Toumba.
L’une des principales contradictions notées durant sa déposition est le fait de prétendre ne pas connaître les gendarmes qui l’accompagnaient, alors qu’il dit dans sa déposition les avoir « appelés » après que leur chef (ndlr : aujourd’hui décédé) ait fait la « programmation » du groupe qui devait faire la patrouille de ce jour.
Dans sa déposition, l’ex aide de camp de Dadis a déclaré et maintenu qu’il est allé au stade avec le féticheur de Dadis, un certain Foromou qui est un civil comme unique occupant de son véhicule.
Qu’au milieu des violences il s’est précipité vers la tribune couverte du stade de Dixinn, appelé les leaders politiques présents pour en sauver une bonne partie qu’il a conduit à l’hôpital pour soigner leurs blessures.
Dadis, Marcel Guilavogui, Claude Pivi, Moussa Tiegboro Camara ont tous nié une quelconque responsabilité dans les massacres et les violences survenus le 28 septembre 2009.
La présidente de l’Association des victimes parents et amis du 28 septembre 2009 (AVIPA), Asmaou Diallo, a déclaré publiquement être « très déçue » de l’attitude de Dadis qui, selon elle, ne tiendrait pas compte de la souffrance des victimes.
Aissatou Walid bah