Dans les méandres de Conakry, des zones comme « Éthiopie » à Koloma Soloprimo illustrent tristement la dérive de certains quartiers devenus des bastions de l’illégalité. L’opération menée ce jeudi 2 janvier 2025 par le Commandant Aguibou Tall et la région spéciale de la gendarmerie de Conakry résonne comme un coup de semonce face à une réalité trop longtemps tolérée.
Une réalité à ciel ouvert
Koloma, derrière le marché, premier lieu ciblé par cette opération, est emblématique de cette insécurité rampante. Les bars et concessions illégaux, non seulement des foyers de nuisances, occupent des terrains appartenant à l’État. La saisie de drogue chez Souleymane Bah, un jeune homme mis aux arrêts, n’est qu’une pièce d’un puzzle bien plus vaste.
Mais c’est à Koloma Soloprimo, dans ce que l’on appelle « Éthiopie », que se cristallise le malaise. Un lieu où la drogue se vend et se consomme en plein jour, où une simple porte peut dissimuler les pires trafics. Mme Y., arrêtée sur place, dément toute implication, mais son témoignage confus ne convainc guère. À ses côtés, des individus soupçonnés de trafic sont eux aussi interpellés. Ces arrestations, bien que nécessaires, interrogent sur les racines d’une problématique endémique.
L’aveu d’une impuissance collective ?
À entendre Mamadou Adama Bah, consommateur de drogue depuis 1996, le tableau est accablant : « Toutes sortes de drogues se trouvent ici. C’est un endroit où quelqu’un peut se cacher pendant des mois après avoir commis un crime. » Cette confession, brute, met à nu le dysfonctionnement d’un système incapable de garantir la sécurité des citoyens. Comment une zone de non-droit peut-elle prospérer au cœur de la capitale ? La réponse, bien que complexe, repose sur un échec structurel où les interventions ponctuelles de la gendarmerie apparaissent comme des pansements sur une plaie purulente.
Vers une stratégie globale ?
Il est illusoire de croire que les opérations coup de poing, aussi spectaculaires soient-elles, suffiront à résoudre le problème. Les réseaux criminels prospèrent sur la pauvreté, l’absence de perspectives et une corruption systémique. Pour que ces actions aient un impact durable, elles doivent s’inscrire dans une stratégie globale. Cela implique non seulement de démanteler les réseaux, mais aussi de réhabiliter les zones touchées, d’offrir des alternatives économiques aux populations concernées et de renforcer les institutions judiciaires.
Un test pour l’État
Cette lutte contre les « sanctuaires » de la drogue est un test pour l’État guinéen, un test de sa volonté et de sa capacité à protéger ses citoyens. Si l’Éthiopie de Koloma n’est qu’un symptôme, le mal qui ronge Conakry nécessite une chirurgie en profondeur. La question n’est pas de savoir si l’on peut démanteler ces zones criminogènes, mais si l’on est prêt à en payer le prix politique et social.
Le statu quo n’est plus une option.
Algassimou L Diallo