Deux mois après le drame du stade 3 Avril de Nzérékoré, le ministre de la Jeunesse et des Sports, Lansana Bea Diallo, alias Bogola, est enfin sorti du silence. Devant les jeunes de la Guinée Forestiere, il a expliqué les raisons de son opposition à l’organisation du tournoi controversé. Un discours où se mêlent fermeté, regrets et appel à l’union.
« Je ne pouvais pas cautionner cela »
Dès le début de son intervention, le ministre a tenu à être clair : sa position contre la tenue du tournoi à Nzérékoré n’avait rien de personnel.
« Quand j’ai été nommé, j’ai dit que je ne viendrais pas à Nzérékoré tant que le problème du stade ne serait pas résolu. Je ne pouvais pas mettre les pieds ici sans solution concrète. »
Sa principale justification repose sur l’absence d’infrastructures capables d’accueillir un événement de cette envergure. « Nzérékoré n’est pas prête pour recevoir Labé, Kankan ou Kindia. Nous n’avons pas de structures adaptées pour une telle compétition. »
Le ministre ne s’arrête pas là. Il dénonce des décisions prises en marge des autorités locales, contrairement à ce qui a été fait dans d’autres régions comme Kankan, Boké ou Kindia, où « le gouverneur et le préfet étaient impliqués ».
Un projet retardé et un stade sous scellé
Bogola ne cache pas sa frustration face aux conséquences du drame. Selon lui, les incidents survenus ont entraîné un retard dans la construction du stade. « La pose de la première pierre était prévue en décembre. La FIFA finance à 100 %. Mais aujourd’hui, à cause de cette situation, les travaux ont été décalés. »
Pire encore, l’infrastructure est aujourd’hui sous scellé judiciaire. « Le stade est fermé car nos frères y ont perdu la vie. La priorité, c’est de clarifier les responsabilités. »
Un appel est donc lancé aux jeunes pour plaider en faveur de la levée de cette interdiction afin que les travaux puissent démarrer. « Le premier plaidoyer que je vous demande, c’est d’arriver à un accord avec les autorités pour lever le scellé. Parce que si rien ne bouge, Nzérékoré sera la dernière à avoir son stade. »
Un message d’union et de responsabilisation
Le ministre a également appelé à la cohésion sociale.
« Si nous restons divisés, si nous nous laissons manipuler, nous nous tirons une balle dans le pied. Regardez ce qui s’est passé à Zogota. À cause des tensions, le projet a été abandonné. Simandou pourrait connaître le même sort si nous ne changeons pas de mentalité. »
Avec insistance, il invite la jeunesse à tourner la page des conflits et à se concentrer sur le développement. « Nous avons des priorités. Le stade du 3 Avril n’est qu’un début. Nous devons obtenir d’autres infrastructures sportives sous-préfectorales. Mais cela ne sera possible que si nous nous unissons. »
Un message bien reçu ?
Reste à voir si ce plaidoyer sera entendu. Les jeunes de Nzérékoré, encore marqués par le drame, accepteront-ils d’enterrer la hache de guerre pour permettre la relance des projets ? Une chose est sûre : la balle est désormais dans leur camp.
Saliou Keita