Conakry – L’ancien parti au pouvoir, le RPG Arc-en-ciel, s’oppose fermement à l’élaboration d’un nouveau fichier électoral. Selon ses cadres, une simple révision du fichier existant suffirait pour organiser les prochaines élections. Une position défendue avec vigueur par Marc Yombouno, ancien ministre, qui critique le gouvernement de transition et dénonce un « manque de clarté total » dans la gestion du processus électoral.
Dans une déclaration tranchante, Marc Yombouno rappelle que le fichier électoral de 2020 n’a pas été conçu sous l’ère Alpha Condé mais remonte à la présidence du général Lansana Conté. « Dès le début de la transition, nous avons dit que ce fichier n’est pas une création du professeur Alpha Condé ni du RPG Arc-en-ciel. La loi électorale, elle aussi, n’est pas nouvelle, elle a été amendée et améliorée au fil du temps. Comme le prévoit la loi, une révision est nécessaire avant chaque scrutin », martèle-t-il.
Un processus de révision mis en cause
Pour l’ancien ministre, une simple mise à jour suffirait : intégrer les nouveaux électeurs, retirer les défunts et garantir une participation inclusive de tous les acteurs politiques. Il pointe également du doigt l’incertitude qui plane sur les institutions électorales actuelles : « Avant, la CENI était dirigée par un membre de la société civile, avec des représentants des grands partis. Aujourd’hui, quel est l’organe chargé de gérer les élections ? Quel est le code électoral en vigueur ? Personne ne le sait ! »
Marc Yombouno met en garde contre les tensions que pourrait engendrer cette opacité : « Le Premier ministre affirme que le fichier électoral pose problème depuis l’époque Conté. Mais alors, les 500 et quelques manifestations sous Alpha Condé, c’était à cause de ce fichier ? Comme s’il n’était pas en Guinée ! »
Le débat sur la biométrie et le RAVEC
Autre point de friction : l’introduction du recensement administratif à vocation d’état civil (RAVEC), présenté comme la nouvelle base de données électorale. Une décision que conteste fermement le RPG Arc-en-ciel. « Dans tous les pays du monde, il n’existe pas de fichier électoral parfait. Même aux États-Unis, il y a des contestations à chaque élection. Mais en Guinée, on veut tout reprendre de zéro avec le RAVEC, alors que ce projet a été initié sous Alpha Condé ! »
L’ancien ministre rappelle que la biométrie était déjà en place dans certaines communes sous l’ancien régime, avec un coût non négligeable pour les citoyens. « Il fallait payer 150 000 GNF à la banque, 60 000 GNF pour un extrait de naissance biométrique et 100 000 GNF pour une carte d’identité », précise-t-il. Selon lui, le projet Wuri, piloté par la Primature pour une identification généralisée des Guinéens, devait plutôt être une consolidation du système existant, et non une remise à zéro complète.
Dans un climat politique déjà tendu, la question du fichier électoral devient un enjeu explosif. Entre manque de transparence et désaccords profonds, l’organisation des prochaines élections s’annonce plus que jamais incertaine.
Saliou Keita