Dans un décret lu à la télévision d’Etat, le chef de la junte militaire, le colonel Mamadi Doumbouya, a procédé à la mise à la retraite de 22 magistrats dont le président de la chambre des appels de la Cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF), Souleymane Bah, plusieurs conseillers à la Cour suprême, et le président de la Cour des comptes.
Le texte lu à la télévision nationale souligne que la décision a été prise « après l’avis en date du 7 décembre 2022 du Conseil supérieur de la magistrature ».
Au-delà des critères liés à l’âge mis en avant dans le cadre des retraites, certains observateurs se posent des questions sur l’opportunité de ce décret qui tombe au moment où plusieurs dossiers judiciaires de très haute importance sont engagés, principalement à la CRIEF.
Un juriste rappelle que « l’expérience est un des critères de performance dans la profession de magistrat. Dans des systèmes anglosaxons, comme aux Etats-Unis, il n’est pas rare de voir de juges dépasser le cap de 80 ans… Les magistrats qui remplaceront prochainement ceux qui sont partis auront besoin de temps pour trancher sur les dossiers brûlants en cours ».
Ces dernières semaines, la Cour suprême a pris plusieurs décisions qui ont pris le contre-pied ou relativisé des réquisitions du parquet général qui poursuit plusieurs hauts responsables dans des affaires de détournements de deniers publics, corruption, etc.
« Le décret du colonel Doumbouya peut avoir des implications réelles. Mais l’essentiel est que la justice reste le principal pilier sur lequel tous les citoyens, quel que soit leur rang, peuvent compter. C’est cet aspect qu’il faut surveiller », affirme un expert judiciaire à lindependant.org.
Avec ces mises à la retraite au sein de la magistrature, il est clair qu’une grande bataille s’annonce pour les personnalités inculpées par la CRIEF dont les avocats et des organisations de droits de l’homme s’inquiètent de la « lenteur des procédures », au moment où le parquet soutient qu’il dispose de preuves justifiant la détention ou la poursuite des responsables mis en cause.
Ci-dessous, la liste des 22 magistrats mis à la retraite :
- M. Cécé Théa, matricule 581053 K, conseiller à la Cour Suprême,
- Madame Aïssatou Poréko Diallo, Matricule 578763 E, conseillère à la Cour Suprême.
- M. Aboubacar Sylla, Matricule 578933 C, conseiller à la Cour Suprême,
- M. Ibrahima Kabèlè Bangoura, Matricule 578664 D, conseiller à la Cour Suprême,
- M. Mamadou Maladho Diallo, Matricule 578784 U, conseiller à la Cour Suprême,
- M. Amadou Sylla, Matricule 573491 L, ex secrétaire exécutif du conseil supérieur de la magistrature,
- Madame Paulette Kourouma, Matricule 571370 K, présidente de chambre à la Cour Suprême,
- Madame Joséphine Lamou, Matricule 511915 K conseillère à la Cour Suprême,
- Madame Kadiatou Traoré, Matricule 578955 X, présidente de chambre à la Cour Suprême,
- M. Baïla Diallo, Matricule 578770 M, conseiller à la Cour Suprême,
- Souleymane Bah, Matricule 578652 H, président de la chambre des appels de la CRIEF,
- M. Lansana Kayaly Touré, Matricule 578949 Y, magistrat en service à l’inspection générale du ministère de la justice et des droits de l’homme,
- M. Fodé Moussa Camara, Matricule 514249 T, magistrat à la Cour Suprême,
- M. Kaman Guilavogui, Matricule 578818 C, magistrat à la Cour d’Appel de Conakry,
- M. Fagninba Condé Matricule 578739 V, président du TPI de Kankan,
- M. Mohamed Lamine Diawara, Matricule 578799 K, conseiller à la Cour d’Appel de Conakry,
- M. Mamadou Traoré, Matricule 578956 C, conseiller à la Cour d’Appel de Kankan,
- M. Mamady Keïta, Matricule 584859 T, conseiller à la Cour Suprême,
- M. Étienne Kamano, Matricule 578831 V, conseiller à la Cour d’Appel de Conakry,
- M. Mamadou Ciré Doumbouya, Matricule 582510 U, président de chambre à la Cour des Comptes,
- M. Fodé Kerfala Camara, Matricule 582515 Z, secrétaire général de la Cour des Comptes,
- M. Mamady Mara, Matricule 582518 J, conseiller Maître à la Cour des Comptes.
Amadou Tidiane Diallo