Dans cette interview accordée à lindependant.org, Aboubacar Soumah, président du Parti pour le progrès et de changement (PPC), a abordé plusieurs questions d’actualité dont la rencontre du ministre de l’administration du territoire et de la décentralisation avec les maires et les chefs de quartiers de la zone spéciale de Conakry.
Lindépendant.org. Le ministre de la l’administration du territoire et de la décentralisation a rencontré les maires et les conseillers communaux pour taper du poing sur la table sur plusieurs sujets, dont les ventes des domaines de l’état, les questions d’état civil, etc. Quelle est votre réaction ?
Aboubacar Soumah : Je pense que le ministre a communiqué comme un PDG d’entreprise ; il n’a pas parlé en tant que gestionnaire de la chose publique. Si aujourd’hui vous prenez la gestion des communes en République de Guinée, vous verrez qu’il y a un fossé entre le Code de collectivité et ce qui se passe sur le terrain. Ça veut dire qu’en termes de gestion, les communes n’ont pas bénéficié des fonds de l’agence de financement des communes au niveau national.
C’est eux, au niveau du département de tutelle, qui ont pris en otage les attributions des communes, c’est eux qui sont en train de jouer le rôle des communes. En termes de recettes, quand vous prenez aujourd’hui les communes de la capitale, on ne fait plus de recettes en termes de CFI qui est une taxe propre à la commune qui a été retirée, mais aussi d’autres taxes dont on ne bénéficie pas. Tous les marchés sont au niveau du gouvernorat de la ville de Conakry, ce ne sont pas les communes qui gèrent. Vous avez vu au niveau de gouvernorat, la dame qui est-là, elle est nommé par décret, là aussi le Code de collectivité est violé. Le ministre de l’administration et du territoire n’en a pas tenu compte, il a agi avec le cœur. Il se sent fort parce que c’est un élément de la transition. Je pense qu’il est passé à côté.
Lindependant.org : Donc cette sortie de Mory condé ne vous rassure pas ?
Aboubacar Soumah : Non ! Ça ne nous rassure pas, quand il parle de domaine de l’Etat, vous savez, l’affaire de gestion du domaine privé ou du domaine public de l’Etat revient toujours au département de tutelle. Nous savons comment ça se passe, au lieu de s’attaquer aux élus, il faut s’attaquer au département de tutelle. Actuellement au niveau des préfectures ou des communes, où il y a une direction de l’habitat. Nous pensons que ce dossier est crucial et qu’il fallait analyser pour savoir qu’est-ce qu’il faut pour agir bien et pour mettre fin aux conflits domaniaux à Conakry. Il faut aller dans les communes : chaque commune n’a que 4 ordinateurs et ça c’est peu pour enrôler ceux qui ont besoin de leur extrait de naissance. Deuxièmement ils n’ont pas de connexion internet, c’est inimaginable qu’au 21 siècle, dans nos communes, il n’y a pas de connexion, il n’y a pas de Wi-Fi.
Lindependant.org : A qui la faute alors ?
Aboubacar Soumah : C’est à l’Etat, les communes n’ont pas de moyens, il gère tous les avoirs de communes. C’est ce que les gens doivent comprendre, les 160 mille francs qu’ils récupèrent dans la main de citoyens c’est avec quelle manière… Allez-y dans les banques, même pour avoir ce reçu-là, les gens se bousculent dans les banques, dans un désordre qui ne dit pas son nom !
Lindependant.org : Les maires, chefs de quartiers et élus locaux sont sous menace s’ils ne parviennent pas à mobiliser lors du prochain samedi d’assainissement…
Aboubacar Soumah : La question d’assainissement appartient aux communes, si vous avez constaté depuis l’arrivée d’Alpha (Ndlr : l’ex président Alpha Condé), ils ont retiré ça dans la main des communes. La population n’est pas esclave, on ne peut pas leur imposer de sortir nettoyer, il faut avoir la méthodologie. Si cela est géré par le département de tutelle, qu’est-ce que voulez que les conseillers fassent ?
Je pense qu’ils ont un agenda parce que quand il a dit à Kindia qu’ils vont dissoudre tous les conseils communaux, je pense que c’est une violation flagrante du Code de collectivité et du Code électoral. Il n’y a aucun article qui stipule qu’au terme du mandat des conseils communaux, qu’ils peuvent être remplacés par des délégations spéciales. Jusqu’à présent on n’a pas un chronogramme électoral fiable en République de Guinée pour le retour à l’ordre constitutionnel, c’est machiavélique pour s’éterniser au pouvoir, ils ne veulent pas organiser les élections. Sinon la question de l’assainissement est une autre question.
Propos recueilli par Alpha Amadou Diallo