L’homme politique Amadou Oury Bah dit « Bah Oury », témoin et victime des tragiques événements du 28 septembre 2009, livre depuis le lundi 20 mars un témoignage sobre et direct qui, selon plusieurs experts, met à rude épreuve la ligne de défense du capitaine Moussa Dadis Camara.
L’ex ministre de la réconciliation nationale (sous l’ancien président Lansana Conté) a conforté plusieurs points du témoignage du commandant Aboubacar Toumba Diakité dit « Toumba » au point de provoquer l’ire des défenseurs de l’ex chef de la junte militaire qui s’était emparée du pouvoir en 2009.
Il a confirmé que le commandant Toumba a réussi à sauver le gros des leaders de la manifestation et confirmé l’incident de la clinique Ambroise Paré où un militaire, identifié par plusieurs leaders politiques et Toumba comme étant le capitaine Marcel Guilavogui, a sorti des grenades, menaçant de « faire sauter » la clinique. Bah Oury a déclaré toutefois ne pas pouvoir dire formellement que c’est Marcel.
Le capitaine Guilavogui a pour sa part nié en bloc sa présence au stade de Dixinn, le jour des massacres, affirmant qu’il était « malade ».
Chose curieuse, Me Pépé Koulémou, l’un des farouches défenseurs de Dadis, a fini par élaborer une thèse curieuse, selon laquelle ce sont les manifestants eux-mêmes qui se seraient entretués dans l’enceinte du stade du 28 septembre le jour du massacre.
Me Koulémou, droit dans ses bottes de sa théorie du « complot » contre son client (Ndlr : fomenté selon lui par Alpha Condé, le général Sékouba Konaté et Toumba), va ajouter plus tard devant les journalistes que des groupes de militaires « incontrôlés » seraient également responsables des graves exactions et crimes commis au grand stade de Dixinn.
L’avocat défend ses propos en affirmant que les manifestants se sont emparés d’armes après le pillage du commissariat de Belle Vue, ce qui est contraire au rapport dressé par le commissaire principal de l’époque à Belle Vue, lu par un avocat de la partie civile, indiquant clairement qu’aucune munition n’était stockée dans ses locaux.
Selon des experts interrogés par lindependant.org, cette thèse aura de toutes les façons du « mal à résister à l’analyse la plus élémentaire ».
« Dire que des manifestants sont ceux-là mêmes qui se sont entretués est insensé. Le plus grave, c’est que c’est révélateur d’un certain désespoir. Si les avocats de Dadis veulent aider leur client, il vaudrait mieux abandonner cette thèse qui ne repose pas sur des faits tangibles », affirme-t-il.
Selon lui, ce ne sont pas les manifestants qui ont fait disparaitre des corps et organisé tout ce qui a été constaté le jour du massacre, en amont comme en aval.
« Comment expliquer ces assassinats de masse, ces viols, les graves incidents à l’hôpital Donka, avec les blessés et les cadavres, le saccage de la pharmacie de l’hôpital Donka, les troubles à la morgue, etc ? Ce la ne peut pas être le fait de manifestants qui n’étaient pas armés. La preuve, aucun militaire, aucun policier, aucun gendarme n’a été blessé par balle… », conclut cette source.
Aïssatou Walid Bah