Alors que les observateurs s’attendaient à un apaisement de la situation sociopolitique, plus de 14 mois après la prise de pouvoir par le Comité national du redressement pour le développement (CNRD), le ministre de la Justice, Alphonse Charles Wright, a demandé par lettre adressée aux procureurs de Kankan et de Conakry d’engager des poursuites contre 187 personnalités dont certaines sont pourtant déjà décédées.
Plusieurs hauts responsables de l’ancien régime déchu le 5 septembre 2021, dont le président Alpha Condé en personne, figurent sur la fameuse liste de hauts responsables dont les comptes avaient déjà été gelés.
Depuis plusieurs mois, des accusations de « corruption, détournements de deniers publics, etc » d’ex personnalités sont distillées dans la presse, toutes rejetées en bloc par les avocats des intéressés.
A date, les observateurs attendent toujours de voir les preuves qui accableraient les mis en cause qui, d’ailleurs, dénoncent une « chasse aux sorcières » visant à les écarter de l’espace politique, en prévision des élections à venir, après la transition.
Les faits présumés visés par Wright sont la « corruption, l’enrichissement illicite, le blanchiment d’argent, le faux et usage de faux en écriture publique, le détournement de deniers publics et la complicité », selon sa lettre.
Toutefois, au moins 5 personnalités publiques figurant sur le tableau diffusé par la presse sont déjà décédées (Condé Hadja Nsira, grande sœur d’Alpha Condé, Doumbouya Mamady, ex directeur INAMO, Marliatou Barry, ex conseillère à la présidence, Alassane Aminata Touré, ex DG Anafic, Claude Kory Koundiano, ex haut représentant du président de la république)…
Quand on sait qu’en droit le décès éteint les poursuites judiciaires, il va de soi qu’une telle erreur sera difficile à justifier.
Autre fait notable, les doublons (Gabriel Curtis, Mounir Cissé par exemple) mais également des fonctions attribuées à des… entreprises privées (Bangaya Sarlu, annoncé comme « préfet de Dinguiraye »).
D’autres erreurs assez grossières sont par ailleurs remarquées dans la lettre signée de Wright.
L’ancien directeur du protocole d’état à la présidence, Mamadi Sinkoun Kaba, s’est fendu d’un message pour fustiger « une tentative de porter atteinte à l’honneur et à la réputation des gens qui ont travaillé avec le Pr Alpha Condé, à quelques exceptions près ».
Cette annonce de Wright survient au moment où les médiateurs nationaux et la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest tentent de trouver un consensus entre la junte militaire au pouvoir en Guinée et les principales coalitions de partis politiques dans le but de favoriser une transition apaisée loin des effets d’annonce et des buzz.