L’histoire politique de la République de Guinée est marquée par une succession de coups d’État militaires, survenus en 1984, 2008, et plus récemment le 5 septembre 2021. À chaque fois, ces prises de pouvoir, opérées par l’armée guinéenne de manière non démocratique et anticonstitutionnelle, ont été accueillies avec un mélange d’espoir et de soulagement par une population lasse et traumatisée par les régimes précédents.
Les Guinéens, dans un élan de rejet envers un système qui les a appauvris, ont exprimé leur soif de liberté et de changement à travers des manifestations de joie populaire accompagnant ces événements politiques. Face à l’absence d’institutions solides et légitimes, la communauté internationale a fini par reconnaître la nécessité d’accompagner ces transitions tout en insistant sur la mise en place d’un processus menant au retour à l’ordre constitutionnel.
C’est dans ce contexte qu’est né le Comité National du Rassemblement pour le Développement (CNRD), dirigé par le Colonel Mamadi Doumbouya, promu Général depuis le 24 janvier 2024, à la suite du coup d’État du 5 septembre 2021. Son accession au pouvoir a suscité un espoir immense parmi les Guinéens, qui aspiraient à un changement radical vers un État de droit et la fin des pratiques corrompues.
Porté par ses discours promettant la restauration de la démocratie, le Général Mamadi Doumbouya était perçu comme un sauveur par la population, qui fermait souvent les yeux sur les critiques pour ne retenir que ses engagements envers le peuple et la communauté internationale.
Pourtant, après deux ans et cinq mois de gouvernance par le CNRD, l’espoir initial s’est rapidement transformé en désillusion. Les nouveaux dirigeants, enivrés par les privilèges du pouvoir, ont montré des signes de conservation du statu quo en recourant aux mêmes méthodes décriées par le passé, reniant ainsi leurs engagements initiaux.
Les promesses de changement se sont heurtées à la réalité d’une gouvernance caractérisée par des violations flagrantes des droits fondamentaux, telles que les violences lors des manifestations, la censure sur Internet, la répression des médias, les détentions arbitraires et les exils forcés. Ces violations sont exacerbées par une insécurité croissante, la corruption endémique et une crise économique et sociale dévastatrice.
Ainsi, les principes proclamés de l’État de droit et de la démocratie ont été gravement compromis, laissant place à une forme de dictature rampante qui menace la stabilité et l’unité nationale.
Mais comment en sommes-nous arrivés là ? Le Général Mamadi Doumbouya, entouré d’opportunistes dépourvus de conviction, semble avoir été aveuglé par des discours grandiloquents et des promesses vides. Pourtant, le changement véritable ne peut se réaliser qu’avec des hommes et des femmes de conviction, non des opportunistes en quête de faveurs personnelles.
Pour sortir de cette impasse, un dialogue constructif entre les forces vives de la nation et le CNRD est indispensable. Le Président de la transition doit avoir le courage de reconnaître les erreurs et de rectifier le cours de la transition. Il est impératif de concentrer tous les efforts sur l’organisation d’élections libres et transparentes, afin de restaurer l’ordre constitutionnel et de permettre aux Guinéens de choisir leurs dirigeants en toute liberté.
En agissant ainsi, le Général Mamadi Doumbouya évitera à la Guinée une crise majeure et rendra service à lui-même ainsi qu’à tous les Guinéens qui aspirent à un avenir démocratique et prospère.
Par Ibrahima Diallo
Responsable des Operations du FNDC