L’éventualité d’une candidature du Général Mamadi Doumbouya aux prochaines élections suscite de vives réactions et fait monter la tension au sein de la classe politique guinéenne. La publication par le Conseil National de la Transition (CNT) du projet de nouvelle Constitution pour la Guinée a ravivé les débats, notamment avec l’introduction de dispositions permettant aux candidats indépendants de se présenter. Bien que cette mesure puisse être perçue comme un pas en avant vers une plus grande ouverture démocratique, elle alimente également les spéculations sur les intentions réelles de ceux qui détiennent actuellement le pouvoir.
En 2021, lors de la prise du pouvoir par le Comité National du Rassemblement pour le Développement (CNRD), Mamadi Doumbouya et ses alliés avaient fermement promis, via la Charte de la Transition, de ne pas briguer de mandats électoraux. Cet engagement, inscrit noir sur blanc dans les articles 46, 55 et 65 de la Charte, était présenté comme une garantie de la neutralité de la Transition, assurant que ceux qui supervisent ce processus ne puissent pas en bénéficier directement.
Aujourd’hui, à l’heure où le pays se prépare à tourner la page de la Transition, des voix s’élèvent pour rappeler à l’ordre. Cellou Dalein Diallo, figure de proue de l’opposition, et ses alliés de l’Alliance Nationale pour l’Alternance et la Démocratie (ANAD), expriment ouvertement leurs préoccupations. Dans une lettre adressée au président du CNT, Dr Dansa Kourouma, l’ANAD demande avec insistance la réintégration des articles de la Charte de la Transition qui interdisent la candidature des responsables actuels dans le projet de Constitution.
L’argument de l’ANAD est clair : toute tentative de révision ou d’omission de ces articles serait perçue comme une trahison des engagements pris envers le peuple guinéen et la communauté internationale. Ces articles, qui interdisent explicitement aux membres du CNRD, du gouvernement et du CNT de se présenter aux élections, sont cruciaux pour garantir un processus électoral impartial et transparent. Leur suppression ouvrirait la voie à des dérives autoritaires et risquerait de compromettre la crédibilité des élections à venir.
Mais au-delà des préoccupations exprimées par l’opposition, c’est la crédibilité même de Mamadi Doumbouya et de son équipe qui est en jeu. Le respect des engagements pris au début de la Transition est essentiel pour maintenir la confiance de la population et de la communauté internationale. Toute velléité de s’accrocher au pouvoir, même sous couvert de légitimité électorale, pourrait être perçue comme une trahison des principes énoncés en 2021.
Dans cette phase délicate, où la Guinée aspire à une transition pacifique et à une nouvelle ère démocratique, il est impératif que les dirigeants de la Transition fassent preuve de clarté et de transparence. La réintégration des articles 46, 55 et 65 dans le projet de Constitution ne devrait pas être vue comme une contrainte, mais comme un engagement renouvelé à respecter la volonté du peuple et à garantir un processus électoral véritablement libre et équitable.
La balle est désormais dans le camp du CNT et de Mamadi Doumbouya. Le peuple guinéen attend des actes concrets, pas des promesses. L’heure est venue de dissiper les doutes et de prouver que cette Transition ne sera pas une simple répétition des erreurs du passé, mais une véritable ouverture vers un avenir démocratique et inclusif.
Alpha Amadou Diallo