Après dix mois de cavale, Claude Pivi, ancien ministre de la Sécurité sous le régime de Moussa Dadis Camara, a été arrêté au Liberia et extradé vers la Guinée. Ce rebondissement spectaculaire, annoncé ce 19 septembre 2024 par le procureur du parquet militaire lors d’une conférence de presse, signe la fin d’une fuite qui n’a cessé de hanter l’opinion publique guinéenne. Une cavale dont les contours rocambolesques soulèvent des questions brûlantes sur les défaillances de la sécurité nationale et les complicités dont a pu bénéficier cet ancien dignitaire militaire.
L’évasion qui embarrasse l’État
C’était une évasion comme la Guinée n’en avait jamais connue. Le 4 novembre 2023, Claude Pivi s’échappait de la prison centrale de Conakry, quelques jours seulement avant sa condamnation à perpétuité pour son rôle dans le massacre sanglant du 28 septembre 2009. Un véritable camouflet pour les autorités. Comment un personnage aussi surveillé a-t-il pu déjouer les gardiens de la prison la plus sécurisée du pays ? Cette question, encore sans réponse, reste un point noir dans ce dossier. Pendant près d’un an, Pivi a réussi à échapper aux forces de l’ordre, profitant de la perméabilité des frontières et sans doute d’appuis logistiques.
Une cavale entre les mailles de la forêt
Claude Pivi lui-même, dans ses premières déclarations après son arrestation, a décrit son périple : une fuite à travers la forêt guinéenne, accompagné de trois individus non identifiés, avant de trouver refuge dans son village natal, puis au Liberia. Une aventure digne d’un film, qui n’aurait pu se réaliser sans une faille béante dans la surveillance des frontières et, peut-être, des complicités locales.
La coopération sécuritaire entre deux pays
Mais cette cavale a aussi montré un autre visage : celui de la coopération régionale. L’arrestation de Pivi n’aurait pas été possible sans une collaboration étroite entre les forces de sécurité guinéennes et libériennes. Le procureur guinéen n’a d’ailleurs pas manqué de saluer cette entente qui, malgré une frontière poreuse et une région difficile d’accès, a permis la capture de ce fugitif de haut rang. L’extradition de Pivi, sous haute surveillance, marque un tournant dans cette affaire.
Un retour en prison et des zones d’ombre
De retour derrière les barreaux, Claude Pivi ne pourra plus échapper à la justice. Toutefois, cette arrestation ne clôt pas le dossier. L’enquête continue, et l’on attend des réponses. Qui a aidé Pivi dans sa fuite ? Comment a-t-il pu bénéficier d’un soutien aussi organisé ? Le procureur a promis des investigations approfondies pour identifier tous les acteurs impliqués dans cette évasion. Les Guinéens attendent des réponses, et l’État a l’obligation de les leur fournir.
Un enjeu symbolique pour la justice guinéenne
L’arrestation de Claude Pivi constitue sans doute une victoire pour les autorités guinéennes, mais elle met aussi en lumière les faiblesses d’un système sécuritaire à bout de souffle. Pour le pays, il ne s’agit pas simplement de ramener un fugitif derrière les barreaux. Il s’agit de restaurer la confiance du peuple dans la justice, de montrer que personne, pas même un ancien ministre influent, n’est au-dessus des lois. Mais tant que les zones d’ombre persistent, ce retour en prison n’effacera pas le goût amer laissé par cette affaire.
Alpha Amadou Diallo