Conakry, 4h du matin. L’obscurité à peine troublée par l’éclairage public. Dans un quartier encore endormi, des hommes en treillis, encagoulés et lourdement armés, investissent une habitation. Leur cible : Abdoul Sacko, figure de la société civile. En quelques minutes, il disparaît dans un convoi de véhicules blindés. Une scène digne d’un film d’action, mais bien réelle.
Une disparition annoncée ?
Aux premières lueurs du jour, la nouvelle se répand comme une traînée de poudre. Sur place, des voisins sous le choc racontent l’intervention brutale des ravisseurs. Selon Me Almamy Samory, avocat de l’activiste, ce scénario n’a rien de surprenant. « Nous nous attendions à cela. Abdoul Sacko recevait des menaces depuis des semaines. Nous avions même déposé une plainte auprès du procureur de Dixinn pour menaces de disparition forcée », confie-t-il.
Les éléments recueillis écartent d’emblée l’hypothèse d’un acte criminel ordinaire. « Ce n’est pas un enlèvement de droit commun. Les auteurs portaient des uniformes militaires et utilisaient du matériel sophistiqué », souligne Me Samory.
Un raid d’une violence inouïe
Les témoignages décrivent une opération méthodique et expéditive. « Ils ont forcé des voisins à leur indiquer la maison d’Abdoul Sacko, allant jusqu’à les ligoter pour les contraindre à coopérer », raconte un proche sous couvert d’anonymat. Incapables de fracturer la porte, les assaillants ont perforé le plafond pour s’introduire dans la maison. « Ils l’ont trouvé, giflé, ligoté, puis embarqué sans un mot », détaille l’avocat.
Des autorités dépassées ?
Dès l’aube, Me Samory alerte le procureur de Dixinn, qui, selon lui, ignorait tout de cette opération. « Il était surpris. Nous allons faire le tour des services de sécurité pour tenter de retrouver Abdoul Sacko. Mais nous savons comment ce genre d’affaires se termine en Guinée… », lâche-t-il, amer.
Ce nouvel enlèvement s’ajoute à une longue série de disparitions forcées qui endeuillent le pays. Un climat d’insécurité grandissant qui inquiète autant qu’il interroge : qui orchestre ces opérations ? Et surtout, jusqu’où ira cette spirale infernale ?
Saliou Keita