L’augmentation injustifiée des loyers en Guinée devient un véritable casse-tête pour de nombreux locataires, surtout dans les zones urbaines. Pourtant, le cadre juridique en la matière est sans équivoque. Pour éclairer cette problématique, nous avons rencontré Kalil Camara, juriste-consultant et coordinateur de la plateforme KC Consultation Juridique.
Selon le Code civil guinéen, « le bailleur est libre de fixer le montant du loyer lors de la signature du contrat, mais il ne peut pas augmenter ce loyer de manière arbitraire », souligne Kalil Camara. Cette disposition légale vise à protéger les locataires contre des hausses abusives souvent qualifiées de « fantaisistes ».
Des droits en cas de baisse de jouissance
Le juriste précise que dans certains cas, le locataire peut exiger une diminution du loyer. « Si, pour une raison quelconque, l’utilisation du logement est réduite, le locataire a le droit de demander une réduction du montant du loyer », explique-t-il. Cela inclut des réparations majeures qui limitent l’accès à une partie du logement. « Si ces travaux s’étendent sur une longue durée, le locataire peut même demander la résiliation du contrat et, si la faute incombe au propriétaire, exiger des dommages et intérêts », ajoute Kalil Camara.
Conditions d’augmentation du loyer
En ce qui concerne l’augmentation, l’article 254 du Code de la construction et de l’habitation prévoit des mécanismes stricts. « Les loyers des locaux à usage d’habitation doivent être payés mensuellement », explique Kalil Camara. Ainsi, un propriétaire ne peut imposer un paiement trimestriel ou annuel, bien qu’il puisse en faire la demande. « Le locataire reste libre d’accepter ou non cette proposition, et son refus ne peut être un motif de résiliation du bail », précise-t-il.
Toutefois, une révision du loyer est envisageable dans certaines conditions, notamment en cas de hausse significative du coût des matériaux de construction. « Si les prix du fer à béton, du ciment ou des tôles augmentent de manière notable durant l’année, une révision peut être effectuée. Mais en l’absence de telles hausses, le bailleur n’a aucun droit d’augmenter le loyer », rappelle Kalil Camara.
Après trois ans sans réajustement des prix, la loi autorise une augmentation « raisonnable » du loyer. Cependant, si les parties ne parviennent pas à un accord, c’est le tribunal qui détermine le montant, en tenant compte de critères tels que la superficie et l’état du bien. » Tout réajustement nécessite une négociation entre locataire et bailleur », conclut le juriste.
Le débat autour des paiements électroniques
Avec la popularisation des paiements par voie électronique, une nouvelle question se pose : qui doit supporter les frais de transfert ? Kalil Camara apporte une clarification légale à ce sujet : « Les dettes sont quérables, non portables. En d’autres termes, c’est au créancier, ici le propriétaire, de réclamer son dû. » Ainsi, si le propriétaire demande un paiement via un service mobile comme Orange Money, c’est à lui de prendre en charge les frais de transaction.
En définitive, bien que la loi protège les locataires guinéens contre les hausses arbitraires de loyer, il est crucial que ceux-ci connaissent leurs droits pour mieux se défendre en cas de litige.
Fatimatou Diallo