L’annonce de la nomination de Monsieur BAH Oury à la tête de la Primature avait suscité un profond enthousiasme et espoir au sein de la population guinéenne, étant donné son engagement politique, son combat au sein de l’Organisation Guinéenne de Défense des Droits de l’Homme (OGDH), et sa lutte infatigable pour instaurer une véritable culture démocratique en Guinée. Malheureusement, cette joie fut éphémère, car il incarne désormais le parfait exemple de l’élite guinéenne prompte à changer de discours au gré des intérêts politiques. Une triste réalité.
Il convient de rappeler que son parti politique fait partie intégrante du cadre de dialogue inclusif permanent entre les acteurs politiques guinéens, lequel constitue le comité national permanent chargé du suivi de la mise en œuvre des résolutions dudit cadre. Sa nomination aurait dû être l’occasion de convoquer les acteurs socio-politiques de ce cadre de dialogue, afin d’analyser ensemble les imperfections et de proposer des solutions adéquates pour sortir de la crise.
Pourtant, à peine quelques jours après sa nomination, Monsieur BAH Oury accorde sa première interview à RFI, annonçant que le référendum constitutionnel devrait se tenir avant la fin de l’année, et que les civils ne pourraient revenir au pouvoir avant 2025, au plus tôt. Lors d’une conférence de presse accordée aux médias, il insiste sur le caractère irréalisable du chronogramme de la transition. Puis, le samedi dernier, il persiste dans cette voie en déclarant sur TV5 Monde que le retour à l’ordre constitutionnel, prévu dans un accord avec la CEDEAO, n’aura pas lieu à la date convenue.
À chaque prise de parole, il martèle que la date du 31 décembre est irréalisable, agissant comme s’il avait été politiquement engagé pour repousser le calendrier de la transition. Pourtant, à ce jour, aucun membre du CNRD, y compris le Président de la Transition, le Général Mamady Doumbouya, n’a pris position sur cette question.
Une tendance émerge désormais : tous les acteurs socio-politiques convergent vers un retour à l’ordre constitutionnel, conformément à l’accord conclu entre le CNRD et la CEDEAO, entériné par le cadre de dialogue. Il est donc urgent que tous les acteurs, ainsi que le peuple guinéen, se rassemblent pour faire pression sur le CNRD afin qu’il respecte le chronogramme de la transition.
Il est impératif que les acteurs politiques mettent de côté leurs intérêts personnels pour privilégier l’intérêt supérieur de la nation. Car l’heure est grave, et seule une dynamique nationale unifiée pourra sauver le pays des incertitudes qui se profilent à l’horizon.
Nous sommes conscients des maux qui affligent notre pays : l’extrême pauvreté, la vie chère, la hausse des prix des denrées de première nécessité, les pénuries d’électricité entraînant la faillite de nombreuses entreprises, le manque d’eau courante, les incendies récurrents suscitant une grande inquiétude, la montée du banditisme, la violation des droits humains les plus élémentaires, les restrictions aux libertés fondamentales, y compris la liberté de manifestation, les contraintes imposées aux médias, entraînant la faillite des entreprises de presse et un chômage croissant, la corruption généralisée, la gestion financière désastreuse, les marchés publics opaques… et la liste est longue.
Le peuple guinéen n’est pas dupe. Comme le disait Abraham Lincoln : « On peut tromper une partie du peuple tout le temps, et tout le peuple une partie du temps, mais on ne peut pas tromper tout le peuple tout le temps ». Ainsi, le peuple de Guinée a compris que les motifs du coup d’État du 5 septembre vont bien au-delà des apparences.
La seule solution réside dans la prise de toutes les mesures nécessaires pour que les engagements en faveur du retour à l’ordre constitutionnel soient respectés. Passé ce délai, aucune institution issue du coup d’État du 5 septembre ne sera légitimée par le peuple souverain de Guinée.
Alpha Bayo, Coordinateur National de la MAOG