Depuis plusieurs mois, un voile opaque entoure le paysage médiatique guinéen. Les ondes de certaines radios privées sont brouillées, l’accès à Internet est entravé, et au nom d’une prétendue « sécurité nationale », des chaînes de télévision privées sont évincées du bouquet Canal+. Les conséquences directes de cette situation regrettable se traduisent par des mises en chômage technique touchant de plein fouet le personnel de nombreux groupes médiatiques.
Aujourd’hui, des pères et mères de famille se retrouvent privés de leur gagne-pain, jetés dans une précarité que le CNRD semble ne pas seulement tolérer, mais même encourager. Le Conseil National de la Transition (CNT) laisse ainsi des citoyens perdre leur dignité, les réduisant à la mendicité, sans lever le petit doigt pour rétablir une justice élémentaire.
Pendant tout ce temps, le CNT reste étrangement silencieux. Aucun mot, aucune interpellation envers le gouvernement, et encore moins une enquête parlementaire sur ce qui peut être considéré comme la plus grave atteinte à la liberté de la presse et au droit à l’information depuis 1984. Des appels désespérés de patrons de médias en quête de résolution de cette crise restent lettre morte, le président du CNT restant impassible.
Ironiquement, c’est le CNT qui convoque les associations de presse à une rencontre, non pas pour discuter des entraves à la liberté de la presse, mais pour aborder le sujet délicat des sextapes. Bien que cette question soit indéniablement importante, la véritable préoccupation devrait résider dans la résolution de la crise médiatique actuelle. La justice, appuyée par le code pénal et la loi relative à la cyber-sécurité, doit être la garante de la protection des données et de la vie privée.
Il est temps que le CNT se recentre sur sa mission première, l’élaboration d’un projet de constitution, et qu’il assume pleinement son rôle en interpellant le gouvernement sur les atteintes à la liberté de la presse et au droit à l’information. La presse elle-même devrait exiger cela plutôt que de participer à une réunion hors sujet. La publication de contenus à caractère sexuel ne relève pas du domaine de la presse, mais plutôt de manipulations politiques éventuelles.
Peut-être que les membres du CNT cherchent à détourner l’attention de scandales similaires touchant certains d’entre eux, vu que la diffusion de vidéos intimes semble devenir une pratique courante. Face à cette dérive, la presse se doit de boycotter cette rencontre par dignité, respect de soi-même, et cohérence.
Sekou Koundouno, Responsable des Stratégies et Planification du FNDC.