Ce samedi 11 mars 2023, Abdoul Sacko, coordinateur du forum des Forces Sociales et Ismaël Diallo, coordinateur général adjoint du Réseau CoJeLPaiD (Réseau Convergence des Jeunes Leaders pour la Paix et la Démocratie) ont été arrêtés en pleine circulation par des gendarmes. Les deux activistes ont été libérés tard dans la soirée. Joint par Africaguinee.com, Ismaël Diallo a expliqué les circonstances de cette affaire.
AFRICAGUINEE.COM : Expliquez-nous les circonstances dans lesquelles vous avez été arrêtés ?
ISMAEL DIALLO : On partait à petit Bateau. Arrivée à Dixinn, un pickup bourré de gendarmes nous a interceptés. Les agents nous ont sommé de les suivre. Certains sont montés à bord de notre voiture que je conduisais. Un d’eux m’a lancé : Sais-tu que tu conduis mal ? Je lui ai dit non, je suis sur la ligne. Je lui ai dit : qu’est-ce qu’on a fait au juste ? Pendant ce temps, mon ami était au téléphone. Ils ont enjoint Sacko d’arrêter de parler au téléphone. Abdoul Sacko pensait que c’était juste une interpellation de routine. Puisqu’ils klaxonnaient, on s’est dit peut-être, c’est parce qu’on ne leur a pas laissé le passage. Quand je leur ai demandé où est-ce qu’ils nous envoient, ils m’ont dit que c’est à la fourrière, à Dixinn, dans l’enceinte de la mairie. On les a suivis. J’ai demandé toutefois s’ils étaient de la police parce que pour moi, cela ne relève pas de leur compétence.
On est parti à la gendarmerie de Dixinn où ils nous ont retiré nos téléphones et la clef de la voiture. Ils nous ont fait poiroter un peu. Après, ils ont reçu des instructions pour nous conduire à la direction des investigations judiciaires. Ils ont fait embarquer Sacko dans le pick-up, moi je suis resté dans la voiture dans laquelle nous étions venus. Mais, c’est un gendarme qui a pris le volant et un autre est resté derrière moi.
On nous envoie à la direction des investigations judiciaires. On reste là. Après, ils ont mis le téléphone de Sacko sur mode avion. Le mien, ils l’ont pris, je recevais des appels incessants. C’est ainsi que je leur ai proposé d’accepter que je dise quelque chose à ceux qui m’appelaient. Entretemps, ils ont dit qu’ils voulaient fouiller notre voiture. Sacko s’est opposé en leur disant qu’ils ne doivent pas fouiller notre voiture en l’absence de nos avocats parce qu’on ne sait pas de quoi ils nous accusent (…). Le commandant de là-bas, un certain Traoré a appelé en essayant de nous mettre en confiance sur la nécessité de fouiller la voiture. Mais Sacko a insisté sur le refus. Et quand il est venu, il a exigé à ce que la voiture soit fouillée. Finalement j’ai convaincu Sacko d’accepter.
Ils ont fouillé la voiture de fond en comble, mais ils n’ont rien trouvé. Il y avait mon sac derrière dans lequel se trouvait mon ordinateur. Ils ont trouvé l’ordinateur, et m’ont appelé pour que je monte dans la salle avec mon ordinateur pour qu’ils puissent fouiller dedans. J’ai essayé de chercher à savoir la raison, il y a un gendarme qui m’a dit que je n’ai pas le droit de lui demander. Je lui ai dit que je voulais juste savoir si c’était son rôle de le faire. J’ai ouvert l’ordinateur, ils ont fouillé, en ouvrant les documents (world).
Par la suite, ils ont demandé à Sacko sa profession. Il a dit qu’il est activiste de la société civile mais qu’il est diplômé en ingénierie électromécanicien. Ils lui ont demandé ce que je faisais dans la vie, il leur a dit que je suis journaliste. C’était au téléphone, après il a demandé à ce qu’on me passe le téléphone. C’est ainsi que j’ai dit au commandant qu’il me mettait dans une situation embarrassante. Il m’a dit de rester tranquille et que c’est juste une question de routine. Il m’a dit qui suis-je, j’ai répondu sue je suis journaliste et activiste de la société civile.
Lorsqu’ils ont ouvert mon ordinateur, ils ont vu une déclaration des Forces Vives. Ils m’ont demandé qu’est-ce que cette déclaration faisait dans mon ordinateur. Je leur ai répondu que je suis avant tout journaliste, j’ai un site personnellement où je publie des informations. Ils m’ont demandé le nom de mon site, je l’ai ouvert, ils ont lu la déclaration sur le site après ils ont fermé. Maintenant partout où ils voient un document où c’est écrit TRANSITION, DIALOGUE ; ils disaient : ‘’ ça c’est quoi’’ ? Je leur ai fait comprendre que je rédige des articles de presse et que je travaille avant tout sur des projets. Finalement je pense qu’ils n’ont pas trouvé grand-chose.
Lorsqu’ils m’ont dit que je pouvais partir, je suis descendu voir Sacko pour lui dire qu’on peut partir. Mais Sacko m’a dit non, il faut qu’il sache la raison pour laquelle on nous a amené là-bas. Je lui ai dit de laisser ces détails, on va gérer ça après. Entretemps ils sont venus en courant vers moi pour dire : c’est Ismaël qui est libre, vous (Abdoul Sacko, ndlr) vous restez encore.
Je pense qu’ils ont décidé de retenir Sacko. Je lui avais dit que je reviendrai. Mais il m’a dit que pour des questions de sécurité de rentrer d’abord. Mais jusque-là, je ne saurais vous dire pourquoi on nous arrêtés.
Est-ce qu’on vous a présenté une convocation ou un document quelconque pour dire le motif ?
Non, absolument pas. On a été surpris par leur intervention. Ils roulaient derrière moi depuis Dixinn. C’est arrivé à Gamal puisqu’ils ont commencé à klaxonner incessamment, Sacko m’a demandé de leur céder le passage, j’ai ralenti pour ça. Soudain, c’est là où ils sont venus nous barrer la route. Deux gendarmes sont venus s’engouffrer à bord de notre véhicule. Lorsqu’ils m’ont demandé s’ils nous ont brutalisé, je leur ai répondu que ça dépend de la définition qu’ils donnaient à la brutalité ou brutaliser. Parce que pour moi, il y a la brutalité intellectuelle, morale et physique. Le seul fait de me retirer mon téléphone avec force accompagné d’un ton menaçant, c’est déjà de la brutalité.
Pensez-vous que cette arrestation soit liée à l’engagement de votre organisation au sein des Forces Vives ?
Je ne saurai vous le dire parce qu’on ne m’a rien dit sur les raisons de cette arrestation. Ni moi, ni Sacko ils ne nous ont rien dit pour nous situer au moins. Si vous arrêtez quelqu’un parce que vous êtes de la force publique, la moindre des choses c’est de lui dire le : « Pourquoi ? ».
Que comptez-vous faire ?
Pour le moment, il y a les autres acteurs de la société civile qui avaient fait une première déclaration. Moi, je suis en route (21h 20) pour aller chez moi. La réflexion on la fera ensemble pour savoir sur quels pieds danser.
Après ce qui s’est passé est-ce que vous avez reçu l’appel des religieux ?
J’ai reçu beaucoup d’appels mais je ne sais pas pour le moment s’ils ont essayé de m’appeler. Dans tous les cas, dans les prochaines heures nous serons situés.
(Source Africaguinée)