Les chefs d’État de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) ont officiellement pris acte de la décision du Mali, du Burkina Faso et du Niger de quitter l’organisation. Une séparation historique qui interroge l’avenir de l’intégration régionale, sur fond de tensions géopolitiques et de défis institutionnels majeurs.
Une séparation aux contours inédits
Le retrait de ces trois États sahéliens sonne comme un échec pour l’institution ouest-africaine, créée pour promouvoir l’intégration régionale. L’histoire se répète, mais l’enjeu semble bien plus crucial qu’en 2000, lorsque la Mauritanie avait déjà choisi de claquer la porte.
Le président de la Commission de la Cédéao, Omar Alieu Touray, se voit désormais investi d’un mandat délicat : organiser cette séparation. Derrière la froideur bureaucratique des termes « formalités de retrait » se cache une réalité plus complexe. Il faudra gérer le sort des salariés contractuels originaires des pays sortants et préparer le transfert des agences communautaires établies sur leurs territoires. Une tâche titanesque qui expose les failles structurelles de l’organisation.
Un tempo imposé par les juntes
Depuis près de onze mois, les juntes au pouvoir à Bamako, Ouagadougou et Niamey semblent avoir maîtrisé leur calendrier. Chaque geste, chaque déclaration a ressemblé à un coup d’avance. Et c’est dans ce climat de défiance qu’Omar Alieu Touray a dû officialiser l’inéluctable : « Conformément aux dispositions de l’article 91 du Traité révisé de la Cédéao, les trois pays cesseront d’être membres de l’organisation à compter du 29 janvier 2025. »
Pourtant, un dernier espace de dialogue subsiste. À la demande du Sénégal et du Togo, les médiations se poursuivront durant les six prochains mois. Une ultime chance laissée à ces pays pour revenir sur leur décision. Mais l’espoir semble mince, tant les relations paraissent irréconciliables.
Une unité fragile, un silence assourdissant
Alors que Bola Ahmed Tinubu, président en exercice de la Cédéao, plaidait pour l’unité et la solidarité, un autre silence s’est fait lourdement sentir. Pas un mot pour l’ex-président nigérien Mohamed Bazoum, toujours retenu à Niamey malgré une décision favorable de la Cour de Justice de la Cédéao.
Dans cette ambiance crépusculaire, la standing ovation réservée à Nana Akufo-Addo, surnommé « Mister Democracy » à l’issue de son dernier sommet, a résonné comme un hommage aux principes fondateurs de l’organisation. Mais ces valeurs sont aujourd’hui mises à rude épreuve.
Le rendez-vous du 30 juillet 2025 marquera-t-il la fin d’une époque ou le début d’un nouveau chapitre pour l’Afrique de l’Ouest ? Une chose est certaine : l’avenir de la Cédéao ne sera plus jamais le même.
Ousmane Sibé Fofana