La salle de conférence sentait la concentration. À Conakry, du 14 au 16 avril, le système de passation des marchés publics guinéen s’est retrouvé sous les projecteurs d’une évaluation de haut vol. Trois jours d’examen méthodique, menés tambour battant selon les standards internationaux de la méthodologie MAPS2, sous l’impulsion du Groupe de la Banque mondiale, en partenariat avec l’État guinéen.
Autour de la table : des hauts fonctionnaires, des experts, des membres de la société civile, mais aussi le secteur privé. Tout ce beau monde s’est penché sur quatre piliers jugés essentiels pour jauger la solidité d’un système de commande publique : le cadre juridique, les capacités de gestion, la transparence opérationnelle et l’intégrité des pratiques.
Un diagnostic franc et collectif
Les participants n’ont pas chômé. Groupes de travail interactifs, échanges nourris, diagnostics croisés… Le coordinateur sous-régional de la Banque mondiale, Abdoulaye Keita, a salué le caractère “inclusif et interactif” des discussions. Le but ? Épingler ce qui fonctionne, sans perdre de vue les nombreuses failles à corriger.
« Nous avons identifié à la fois les forces et les manques du système guinéen, en espérant pouvoir le hisser au niveau des meilleurs standards internationaux », résume Keita. En somme, une opération vérité sur une machine administrative souvent critiquée pour son opacité et son inefficacité.
Des recommandations qui sonnent comme un début de révolution
Au terme des travaux, des recommandations ont fusé. Parmi les plus marquantes : la transformation de l’Autorité de régulation des marchés publics en une véritable Autorité de la commande publique, englobant également les partenariats public-privé. Un changement de paradigme qui marquerait une évolution majeure dans l’architecture institutionnelle.
Amadou Yéro Bah, président intérimaire de la Cour des comptes, se veut optimiste : « C’est une avancée nécessaire, car le système actuel a besoin d’une réforme en profondeur, de la passation jusqu’au contrôle. »
La société civile veut sa place au banquet
Mais au-delà des institutions, c’est aussi la voix de la société civile qui s’est fait entendre. Oumar Kana Diallo, président de l’Association guinéenne pour la transparence, plaide pour une implication active des citoyens dans les phases de planification et de consultation des marchés.
« La société civile ne peut pas tout faire, mais elle doit avoir voix au chapitre dès le départ », martèle-t-il. Un point de vue partagé par plusieurs acteurs présents, qui appellent à renforcer le contrôle citoyen pour juger de la qualité réelle des projets exécutés.
Et maintenant ?
Les recommandations, compilées et transmises à la Banque mondiale, seront décortiquées par le comité de pilotage de la réforme. Une première version du rapport est attendue dans les prochaines semaines, avec une version définitive annoncée pour septembre.
La vraie question demeure : ce grand déballage débouchera-t-il sur de vraies réformes ? Ou rejoindra-t-il la longue liste des diagnostics sans lendemain ? En attendant, les marchés publics guinéens ont été passés au peigne fin. Reste à savoir si la thérapie suivra le bon traitement.
Algassimou L Diallo