Le Parlement guinéen est secoué par un scandale financier d’une ampleur inédite. Pendant six ans, un système opaque aurait permis le détournement massif de primes destinées aux travailleurs de l’Assemblée nationale. Ce n’est qu’avec le recensement biométrique des employés qu’une différence flagrante a été mise à jour entre les montants prévus dans le système de paie et les sommes effectivement perçues.
D’après des sources proches du dossier, l’affaire remonte à 2016. Avant cette date, les travailleurs percevaient leur salaire en espèces et signaient un registre. Avec l’arrivée de Kory Kondiano à la tête de l’Assemblée, le système de primes a été modifié. Officiellement, les primes journalières ont été fixées à 50 000 GNF, mais en réalité, elles auraient dû atteindre 200 000 GNF par jour. Une différence de 4,5 millions GNF par mois par employé, qui se serait évaporée dans des circuits douteux.
Le président actuel du Conseil national de la transition (CNT), Dr Dansa Kourouma, alerté par les syndicats, a exigé des preuves. Les travailleurs ont alors collecté l’ensemble des bulletins de paie de 2016 à 2021. La vérification a confirmé les irrégularités et a conduit à l’ouverture d’une enquête parlementaire. Une commission composée de membres des commissions des affaires économiques et financières, du contrôle budgétaire, du secrétariat général et du mouvement syndical a été mise en place pour faire la lumière sur cette affaire.
Cette fraude, qui s’est poursuivie jusqu’au coup d’État de 2021, semble avoir pris fin avec l’arrivée du CNRD. Les principaux responsables restent à identifier, mais les regards se tournent vers les gestionnaires des finances de l’Assemblée : la Direction administrative et financière (DAF), la trésorerie et la questure. Une somme aussi colossale ne peut avoir disparu sans la complicité de hauts responsables. Les deux législatures concernées, la huitième et la neuvième, étaient respectivement dirigées par Kory Kondiano et Amadou Damaro Camara.
Aujourd’hui, une question s’impose : la justice osera-t-elle aller au bout de cette affaire et sanctionner les auteurs de ce présumé détournement massif ? Pour l’heure, les travailleurs attendent des explications et surtout, la restitution des sommes indûment prélevées. Un test d’intégrité pour les institutions en place, et une première épreuve pour la lutte annoncée contre la corruption.
Algassimou L Diallo