Le système éducatif guinéen est en crise, et ce n’est pas une découverte. Cependant, les propos récents du ministre de l’Enseignement pré-universitaire et de l’Alphabétisation, Jean Paul Cedy, jettent une lumière crue sur l’un des problèmes majeurs : la fraude, non seulement chez les élèves, mais aussi, et surtout, chez ceux censés les encadrer. Oui, vous avez bien lu. Selon le ministre, ce sont les encadreurs qui seraient les premiers responsables de ce fléau.
Dans un constat aussi audacieux qu’inquiétant, M. Cedy affirme sans détour : « Les encadreurs sont plus fraudeurs que les élèves. » Cette déclaration, aussi dérangeante qu’elle puisse paraître, traduit une réalité profonde : le problème n’est pas uniquement dans les salles de classe, mais bien au cœur même de l’institution éducative. Les enseignants et autres acteurs du secteur, censés être les gardiens de l’éthique et de l’intégrité, seraient eux-mêmes tombés dans les travers qu’ils sont censés combattre.
Le ministre ne s’arrête pas là. Dans sa quête de refondation du système éducatif, il affirme avoir pris un « risque » en responsabilisant ces mêmes encadreurs, en espérant qu’une prise de conscience collective les ramènera sur le droit chemin. « Nous sommes en train de faire de la sensibilisation », explique-t-il, reconnaissant qu’il ne s’agit pas simplement d’imposer des règles, mais aussi de redéfinir des valeurs éthiques, autant pour les élèves que pour les enseignants.
Et c’est bien là le nœud du problème. Comment espérer redresser un système éducatif gangrené par la triche, si ceux chargés de l’encadrer sont eux-mêmes à l’origine du mal ? La solution réside, selon Jean Paul Cedy, dans la responsabilisation, la récompense du mérite et la sanction des écarts. Un pari audacieux, mais indispensable.
Cependant, il y a de l’espoir. Le ministre se dit « très optimiste » quant aux nouvelles générations d’enseignants. Ces jeunes, dit-il, veulent voir un changement. Ils ne veulent plus être associés à un système corrompu, à des pratiques honteuses qui font de l’éducation un théâtre de fraude plutôt qu’un lieu d’apprentissage.
Le diagnostic est posé, la voie du redressement est tracée. Reste à savoir si ce sursaut de conscience collective que le ministre appelle de ses vœux sera suffisant pour réformer un système qui en a cruellement besoin. Le chantier est immense, mais il est peut-être temps, enfin, de cesser de tricher.
Alpha Amadou Diallo