Joint par téléphone depuis la France par nos confrères de FIM FM, Maître Vincent Brengarth, un des avocats du Front national pour la défense de la constitution (FNDC), a abordé plusieurs sujets d’actualité en Guinée. L’avocat estime que les deux leaders opposés à la junte militaire au pouvoir en Guinée, Foniké Mengué et Ibrahim Diallo, placés sous mandat de dépôt, ne devraient pas rester en prison.
Le jeudi, 16 février 2023 deux autres morts ont été enregistrés dans les manifestations, vous les conseils du FNDC vous continuez quand même dans cette procédure judiciaire. Qu’est-ce qui va être fait désormais concrètement ?
Me Vincent Brengarth : Nous avons déposé une plainte devant le procureur général près de la cour d’appel pour des faits de meurtre, d’association de malfaiteurs et d’accomplissement arbitraire d’un acte attentatoire à la liberté individuelle. La raison de cette plainte c’est précisément de demander aux juridictions guinéennes enfin de diligenter des poursuites pour des exactions qui ont été commises par la junte, contre une justice à deux vitesses.
Le sens de cette plainte, c’est d’éviter pour une fois uniquement que les choses ne soient dirigées contre ceux qui comptent faire vivre la démocratie et qu’elle concerne enfin les membres de la junte… Donc nous demandons de façon extrêmement forte au parquet général près de cour d’appel de Conakry et parmi les autres poursuites qui perdurent ; évidemment c’est la procédure que nous avons initié en France mais également qui sont pendant devant les juridictions internationales.
Est-ce que vous avez espoir de voir ce dossier se poursuivre en Guinée et que la justice guinéenne essaye de voir comment ce dossier peut prospérer pour que les nombreuses victimes qui sont tombés lors des manifestations du FNDC soient rétablis dans leur droit ?
Evidement on connait la difficulté que peut avoir la justice face à la junte militaire ; maintenant on reste malgré tout avec une franche d’optimisme pour espérer qu’il ait une affirmation d’indépendance de cette même justice parce que lorsque nous avions déposé devant ces mêmes juridictions une plainte contre Alpha Condé et ses dirigeants, il y avait eu des poursuites. Pourquoi, on n’imagine pas est-ce que dans un cas de figure qui est proche, il n’y aurait pas de poursuites diligentée par ce même parquet et surtout qu’on voit bien qu’il y a un stratagème qui saute aux yeux de tous.
Et ce stratagème, c’est à chaque fois d’interdire les manifestations pour tenter par la suite de criminaliser la société civile et de garantir une totale impunité aux forces de l’ordre qui sont à l’origine des exactions. D’ici l’illégalité est d’autant plus manifeste que vous avez notamment fait recours à l’armée qui ne trouve aucunement à se justifier notamment par rapport à la disposition de la loi de 2015 portant maintien d’ordre public en république de Guinée, qui prévoit que normalement les opérations de maintien d’ordre ne sont absolument pas les missions de l’armée, mais sont les missions de la police. Donc, non seulement vous avez des exactions et en plus de cas des exactions qui interviennent dans un cadre absolument illégal puisque rien ne justifie l’intervention de l’armée.
On se demande si vous connaissez le fonctionnement notre système judiciaire, c’est que chez nous là où vous portez plainte ce sont eux-mêmes l’adversaires du FNDC, c’est comme si vous disiez d’engager de poursuite contre eux-mêmes, est-ce que cette action peut prospérer et de l’autre côté du temps de l’ancien président Alpha Condé vous aviez engagé des actions au niveau des juridictions internationales. Est-ce qu’on peut savoir s’il y a eu des avancées à ce niveau ?
Pour l’instant vous savez que les procédures judiciaires sont des procédures qui sont longues parce qu’elles nécessitent que des éléments soient réunis. Il y a des investigations qui sont en cours. La procédure devant la cour pénale internationale est aussi ralentie par l’effet de l’annonce des juridictions guinéennes précisément de vouloir poursuivre Alpha Condé. Donc ce sont des procédures qui maintenant suivent leur cours normal et on connait évidement le délai de la justice, mais aussi pour permettre de garantir que tous les éléments sont véritablement réunis pour que les responsabilités soient déterminées et actées.
Il est vrai que j’ai quelques doutes comme l’euphémisme sur l’indépendance des juridictions Guinéennes, lorsque vous avez des personnes qui sont détenus de façon complètement arbitraire. Vous avez de mesures qui sont extrêmement fortes qui sont prises contre la société civile. Et on n’imagine pas pourquoi, est-ce qu’on ne devrait pas signaler officiellement et procéduralement les exactions commises la junte militaire parce que c’est aussi le seul moyen de pouvoir montrer que des initiatives sont prises et de démontrer que l’inaction formel de la part de la justice.
Le cas de vos clients notamment Foniké Mengué et Ibrahim Diallo qui sont placés sous mandat de dépôt. Qu’est-ce que vous attendez de la justice Guinéenne dans cette affaire ?
Nous attendons la justice Guinéenne qu’elle reconnaisse que les dossiers sont complètement vides. Qu’elle réponde aussi aux différentes alertes qui ont été faites par des rapporteurs spéciaux de l’ONU, qui se sont alertés et qui ont alertés sur les caractères parfaitement arbitraires de leurs détentions. Je crois aujourd’hui, il y a véritablement une nécessité qu’ils soient remis en liberté, qu’ils soient blanchis de toutes les charges qui pèsent de façon purement factice à leur rencontre, enfin qu’ils soient répondu aux rapporteurs spéciaux de l’ONU sur ces questions et les raisons pour lesquelles on cherche à maintenir de façon complètement discrète leur détention, et ça nous permet également de vous dire de vous réaffirmez : que nous nous sommes à leur côté, que nous sommes aux côtés du FNDC pour précisément que des sanctions soient prises pour pouvoir reconnaitre des caractères arbitraires de détentions dont ils font l’objet.
Pour les autorités Guinéennes le FNDC est dissous donc, on pourrait envisager que la justice dise que cette organisation n’a plus de personnalité juridique du fait de sa dissolution. Si cela intervenait, quelles pourrait être les démarches que vous pouvez mener par la suite ?
Alors déjà moi, je ne considère pas que la dissolution soit juridiquement valable. D’ailleurs et c’est pourquoi je mentionnais tout à l’heure les rapporteurs spéciaux de l’ONU mais c’est pareil. Les rapporteurs spéciaux de l’ONU ont pu alerter sur le caractère arbitraire de cette dissolution, ils avaient adressé un courrier fin 2022 à la junte militaire en mesurant un délai pour lui permettre de faire valoir des observations. Et j’observe qu’aucune réponse n’a été apportée, donc si vous voulez la junte ne peut pas à la fois dire que le FNDC aurait été dissous et de l’autre absolument apporter aucun élément de réponse aux organisation internationales qui demandent des explications sur les raisons mêmes de cette dissolution et ça ne trompe personne. Pour moi, le débat de la dissolution n’ont pas lieu d’être parce qu’ils violent de façon tellement manifeste le droit international qu’on ne peut pas penser un instant à sa réalité.
Transcrit par Alpha Amadou Diallo