Dans un entretien accordé à lindependant.org ce mardi 27 décembre, Rafiou Sow président du PRP, membre de l’ANAD, évoque plusieurs points d’actualité dont la rencontre du président en exercice de la CEDEAO avec les responsables politiques et acteurs de la société civiles n’ayant pas pris part au cadre de dialogue inter-guinéen, la recommandation du rapport du dudit dialogue suggérant l’interdiction de toute manifestation pendant les 2 ans de transition et le procès du massacre du 28 septembre 2009.
Lindépendant.org : Le président bissau-guinéen, président en exercice de la conférence des chefs d’Etats de la CEDEAO, Umaru Cissoko Embalo, vient de rencontrer les principaux acteurs sociopolitiques guinéens. Aucun d’entre eux n’a participé au cadre de dialogue. Quelle est votre lecture ?
Rafiou Sow : Je pense que le président bissau-guinéen est dans sa logique. C’était une rencontre qui est prévue périodiquement parfois ça se passe par vidéo conférence, des fois nous envoyons une délégation qui rencontre directement le président de la CEDEAO, comme ce fut le cas cette fois-ci. Nous avons les forces sociales et puis les partis politiques qui n’ont pas participé au cadre de dialogue : l’objectif c’était d’aller réitérer notre détermination à prendre part à un dialogue sincère et crédible, que ce soit sur le territoire guinéen ou hors du territoire guinéen. Nous comptons prendre part à la transition guinéenne. Nous l’avons promis dès le début.
Lindependant.org : Que s’est-il passé concrètement ?
Rafiou Sow : Le président en exercice de la CEDEAO a pu rencontrer notre délégation, il nous a écoutés, il nous a dit qu’il a pris en compte nos préoccupations, et il dit qu’il va œuvrer pour qu’il ait un dialogue accepté par tous. Aujourd’hui il faut reconnaitre même la CEDEAO est préoccupée par ce qui se passe. D’ailleurs l’institution n’a pas pris part à la remise du rapport issu du cadre de dialogue qui s’est déroulé récemment en Guinée.
Lindependant.org : Vous pensez donc que l’absence du médiateur de la CEDEAO lors de la remise des conclusions de la plénière du cadre de dialogue inter-guinéen est la conséquence de la non inclusivité dudit cadre ?
Rafiou Sow : Bien sûr. Souvenez-vous que quand le médiateur de la CEDEAO, le président Yayi Boni a été invité pour assister au lancement, il a manifesté son étonnement quand il a constaté les absences. Lui-même, il l’a dit qu’on lui avait promis que tout le monde serait autour de la table. Les Chefs des Etats de la CEDEAO ont demandé aux autorités de la transition d’organiser un cadre de dialogue accepté et inclusif. Que s’ils ne pouvaient l’organiser ici, ils leur proposeraient que ce soit délocalisé dans un pays frère au sein de la CEDEAO.
Nous de notre côté, nous souhaitons qu’il ait un cadre dialogue en Guinée où toutes les parties prenantes prendront part y compris les exilés ou ceux qui sont en prison seront en résidence surveillée pour qu’ils puissent y prendre part.
Lindepndant.org : Est-ce le cadre de dialogue annoncé par la CEDEAO, dans une des capitales de la sous-région, serait finalement la solution à la crise guinéenne ?
Rafiou Sow : Possible, il y a tellement d’exemples ! On a vu ici en 2010, lors de la transition au temps de Sékouba Konaté, la côte d’Ivoire en a eu, vous avez vu au Tchad, les adversaires se sont rencontrés dans un pays arabe pour discuter et s’entendre sur les principes avant de lancer le cadre de dialogue sur leur territoire. Entre l’Ukraine et la Russie les discussions ont eu lieu en France, aux Etats Unis et ailleurs. Délocaliser le cadre de dialogue n’est pas un crime. J’aime toujours rappeler les valeurs africaines ; quand vous avez des problèmes dans votre foyer avec votre femme, c’est les voisins qui viennent aplanir le problème entre vous.
Lindependant.org : En suggérant, dans les recommandations du rapport issu du dialogue inter-guinéen, l’interdiction de toute manifestation durant les 2 ans de la transition, est-ce que vous pensez que cela est raisonnable ?
Rafiou Sow : Les autorités de la transition ne peuvent pas interdire les manifestations, sinon ils vont à l’encontre de la charte qu’ils nous ont imposée. Manifester est un droit public, c’est un droit élémentaire, universel. La Guinée est signataire de beaucoup de partenariats à travers le monde par rapport à ça. La junte ne peut vouloir unir les Guinéens en interdisant les droits et libertés de citoyens. Je pense que ce serait une dérive totale.
Lindependant.org : Quelle leçon tirez-vous du procès de massacre du 28 septembre 2009 qui voit comparaitre l’ancien président Moussa Dadis Camara ?
Rafiou Sow : C’est une leçon pour tous les Guinéens surtout les gouvernants guinéens. C’est une leçon pour colonel Mamadi Doumbouya et son entourage du CNRD. Il n’est pas exclu que qui que ce soit se retrouve dans un tribunal un jour pour expliquer ce qu’il a fait et comment il a géré les deniers publics quand il était dans les affaires.
Propos recueillis par Alpha Amadou Diallo