Le capitaine Marcel Guilavogui a confirmé ce lundi 10 juillet 2023 que le capitaine Moussa Dadis Camara est bien sorti du camp le 28 septembre 2009 pour se rendre au grand stade de Dixinn où au moins 157 personnes ont été massacrées, une centaine de femmes violées, sans compter les autres exactions commises contre les manifestants opposés à l’époque à la candidature de Dadis à la présidentielle.
« (Le jour du 28 septembre) j’étais sur le chemin pour aller rejoindre mon père malade au quartier Panival au Camp Alpha Yaya quand j’ai vu un cortège imposant. J’ai regardé et je l’ai aperçu (Ndlr : Dadis). Ils sont passés en toute vitesse », a déclaré Marcel.
Celui que l’on présente comme le « neveu » de Dadis a raconté comment par la suite il a décidé de rejoindre Dadis au stade du 28 septembre. Dadis a toujours nié être sorti de son bureau du camp Alpha Yaya le 28 septembre 2009.
« Au stade j’ai vu Beugré (Ndlr : ancien commandant du camp Koundara) qui est entré à toutes pompes. Il y avait aussi Makambo (Ndlr : ex chef des opérations de Dadis). C’est un de mes amis qui m’a informé que Toumba était sorti seul dans sa voiture avec un civil, après le départ du président », a déclaré l’accusé Marcel.
« Au stade, je n’ai vu aucun élément de la garde présidentielle – rapprochée – (Ndlr : le fameux « salon » commandé par Toumba). Aucun », a-t-il souligné.
« Ce sont les éléments de la garde parallèle (comme Makambo) qui ont commis des dégâts au stade », a affirmé l’accusé.
Jusqu’à ce lundi, Marcel n’avait jamais reconnu s’être rendu au stade, mais ces derniers jours celui qui a préféré garder le silence depuis plus de 13 ans, a eu une brouille avec l’ex chef de la junte militaire de 2008-2009.
« C’est le président Dadis qui s’est trahi lui-même. Diviser pour régner. Même le commandant du Salon Escobar ne sait pas comment le président est sorti », a dit l’ancien conducteur de chars d’assaut.
L’avocat de Toumba, Me Paul Yomba Kourouma, avait révélé que Dadis s’était aménagé une sortie secrète pour quitter ses appartements sans éveiller les soupçons de sa garde rapprochée. Me Kourouma a soutenu que Dadis se trouvait à la piscine de Marocana, jouxtant le stade du 28 septembre le jour du massacre. Dadis a nié en bloc toutes ces accusations, confirmées pourtant par un individu qui s’est présenté sur les réseaux sociaux comme un ex agent des renseignements congolais que l’ex chef de la junte militaire de 2008-2009 avait engagé pour coordonner son système de renseignements.
L’individu en question a fourni beaucoup de détails troublants sur l’organisation de la présidence sous Dadis ainsi que sur les opérations secrètes qui auraient été menées par l’ex chef de la junte, y compris, la mobilisation de nouvelles recrues au fameux camp Kaleah.
Marcel a aussi expliqué de durant la discussion engagée le matin du 28 septembre 2009 entre Dadis et Toumba, en présence de plusieurs militaires – dont lui Marcel – qui étaient dans son bureau au camp Alpha Yaya, il a entendu l’ex chef de la junte dire distinctement « le pouvoir est dans la rue, il faut les mâter (Ndlr : les opposants au régime militaire) ».
L’accusé a également confirmé que lors de cette discussion houleuse le commandant Toumba s’est opposé à l’initiative de Dadis (Ndlr : mâter les manifestants) et a donné l’ordre au commandant de salon de ne pas laisser sortir l’ex chef de la junte de ses appartements.
Avant l’audience du lundi, l’avocat de Marcel, Me David Béavogui, a jeté l’éponge. Selon lui, son client a décidé de donner une version contraire à celle qu’il avait soutenue depuis le départ.
Amadou Tidiane Diallo